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Performance énergétique : votre bien immobilier est-il décent ?

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Le décret du 18 août 2023 (1)  fait suite aux lois « Climat Résilience » et « Énergie Climat ». Il vient rappeler les niveaux de performance énergétique minimaux en matière de décence du logement, mais aussi les exceptions qui peuvent s’appliquer. Ces dernières étant restreintes, l’approche choisie par le gouvernement est assez claire : maintenir le cap fixé en matière de rénovation énergétique des logements. Le calendrier prévu est également confirmé.

 

Performance énergétique : des critères définis et un calendrier confirmé

A plus ou moins long terme, ce règlement concernera 7,2 millions de passoires énergétiques (étiquettes F ou G) (2), ainsi que les logements étiquetés E au DPE.

 

Les critères d’un logement décent

Récemment, la définition du logement décent fixée à l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 s’est enrichie d’une précision importante concernant la performance énergétique. Le bailleur est aujourd’hui tenu de remettre au locataire un logement décent « répondant à un critère de performance énergétique minimale, défini par un seuil maximal de consommation d’énergie finale par mètre carré et par an, et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ».

Un décret en Conseil d’Etat devait définir le critère de performance énergétique minimale à respecter et fixer un calendrier de mise en œuvre échelonnée. C’est désormais chose faite. Depuis le 1er janvier 2023, pour que le bien puisse être qualifié de décent, sa consommation en énergie doit être inférieure à 450 kWh/m2 en France métropolitaine (3).

 

Le calendrier de la rénovation énergétique

La loi « Climat et Résilience » avait fixé un calendrier pour amplifier la rénovation énergétique et augmenter le niveau d’exigence au fil du temps. Certains professionnels jugent ce calendrier « intenable », « difficile à tenir », notamment en raison de manque d’artisans labellisés RGE pour réaliser les travaux. Le décret du 18 août 2023 le confirme cependant, le gouvernement arguant de la nécessité d’accélérer la rénovation énergétique des logements. La contrainte va donc s’amplifier à l’avenir, le calendrier mis en place étant ambitieux.

Pour être décent, un logement devra obtenir au moins l’étiquette DPE suivante :

  • logement classé F à compter du 1er janvier 2025
  • logement classé E à compter du 1er janvier 2028
  • logement classé D à compter du 1er janvier 2034

Le calendrier est en revanche différent en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte où le niveau de performance minimal correspond :

  • à compter du 1er janvier 2028, à la classe F
  • à compter du 1er janvier 2031, à la classe E

 

Indécence du logement : les conséquences juridiques

L’évolution est d’importance. En effet, si le logement loué ne répond pas aux critères de décence, le locataire peut demander au propriétaire sa mise en conformité. En cas de refus ou de non-réponse, le juge peut être saisi. Il devra déterminer la nature des travaux à réaliser et le délai de leur exécution. Il peut également réduire le montant du loyer ou suspendre, avec ou sans consignation, son paiement et la durée du bail jusqu’à l’exécution de ces travaux.

L’entrée en vigueur de cette nouvelle règlementation en matière de performance énergétique peut donc avoir de très forts impacts sur les propriétaires de passoires thermiques. La capacité de contrainte du locataire en cas d’indécence constatée du logement, sur ce plan, étant manifeste, le risque de contentieux est réel en cas de blocage.

 

Rénovation énergétique : de nouvelles exceptions

Par la loi « Climat et Résilience »

La loi « Climat et Résilience » a toutefois prévu que le juge ne peut ordonner de telles mesures lorsque le logement fait partie d’un immeuble soumis au statut de la copropriété et que le copropriétaire concerné démontre qu’il n’a pu parvenir à un niveau de consommation énergétique inférieur au seuil maximal, malgré ses diligences en vue de l’examen de résolutions tendant à la réalisation de travaux relevant des parties communes ou d’équipements communs et la réalisation de travaux dans les parties privatives de son lot adaptés aux caractéristiques du bâtiment (4).

 

Par le décret du 18 août 2023

Le décret du 18 août 2023 vient accorder une autre possibilité de déroger à la règlementation pour « les cas dans lesquels il est impossible pour le juge d’ordonner la réalisation de travaux visant à atteindre un niveau de performance minimal malgré la réalisation de travaux compatibles avec ces contraintes ».

Il s’agit des situations où :

  • « les travaux nécessaires feraient courir un risque de pathologie du bâti, affectant notamment les structures ou le clos et couvert des bâtiments, attesté par une note argumentée rédigée, sous sa responsabilité, par un homme de l’art »,
  • ou « les travaux nécessaires, entraînant des modifications de l’état des parties extérieures, y compris du second œuvre, ou de l’état des éléments d’architecture et de décoration de la construction, ont fait l’objet, pour ce motif, d’un refus d’autorisation par l’autorité administrative compétente » sur le fondement du code du patrimoine, de l’environnement ou de l’urbanisme.

Le propriétaire doit, bien évidemment produire aux débats les pièces justifiant de l’impossibilité de réaliser les travaux visant à atteindre un niveau de performance minimal, afin de prouver sa bonne foi et la justesse de ses dires.

 

Des exceptions restreintes ?

Si les exceptions prévues par le décret semblent restreintes, dans les faits la situation pourrait être différente. En effet, cela concerne tous les biens soumis à des contraintes patrimoniales ou architecturales, et représente ainsi un « stock » conséquent. Si l’on ajoute à cela les exceptions liées à la copropriété, le nombre de logements potentiellement concernés pourrait s’avérer considérable.

 

Article rédigé par Gaëlle AUDRAIN-DEMEY,
enseignante-chercheuse et responsable du département Droit

 


 

(1) Décret n° 2023-796 du 18 août 2023 pris pour l’application de l’article 6 et de l’article 20-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et adaptant les dispositions des contrats types de location de logement à usage de résidence principale

(2) Observatoire national de la rénovation énergétique, Le parc de logements par classe de performance énergétique au 1er janvier 2022, juillet 2022

(3) Décret n° 2021-19 du 11 janvier 2021 relatif au critère de performance énergétique dans la définition du logement décent en France métropolitaine

(4) Sixième alinéa de l’article 20-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 susvisée

 


 

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