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IMMO | Le chiffre de la semaine : 19% de logements inoccupés à Paris en 2023

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Ce taux représente, selon l’INSEE, la proportion de “logements inoccupés” à Paris en 2023, soit près d’un logement sur cinq. Le taux monte même à 28% dans les arrondissements centraux, et à 36% dans le 8e arrondissement – dans ce que l’on nomme le Quartier central des affaires (QCA), siège des entreprises de l’innovation, du numérique et du luxe.

Le constat n’est cependant pas propre à Paris, puisque toutes les métropoles françaises présentent une telle caractéristique, avec 29% de logements inoccupés à Nice par exemple. “Parmi les 22 métropoles françaises, en 2020, 20 d’entre elles présentent un taux situé entre 8% et 13%“, selon un rapport de l’APUR (Atelier parisien d’urbanisme) sur le sujet.

Mais que signifie le terme de “logement inoccupé”, et doit-on comprendre cela comme une anomalie ou un dysfonctionnement urbain? Dans les faits, le terme est particulièrement maladroit, car il résume de façon réductrice un faisceau de situations différentes. Il regroupe à la fois le logement vacant (9% du parc à Paris) et les résidences secondaires et occasionnelles (10% du parc à Paris), chacun des deux termes étant lui-même pluriel.

Rappelons-le une fois de plus, le logement vacant est à la fois de la vacance conjoncturelle (les logements qui viennent d’être mis en vente ou en location) et de la vacance structurelle, plus durable (les logements qui ne trouvent pas preneurs ou sont bloqués). Or plus le marché de la transaction est dynamique, plus il y a de vacance conjoncturelle, laquelle représente au moins 5% du parc dans les grandes villes : la vacance est donc en bonne partie portée par la mobilité et la dynamique des ménages urbains, et s’avère donc nécessaire à la fluidité du marché. C’est ce qui explique le paradoxe entre un niveau de vacance en apparence élevé et un marché en réalité tendu : il n’y a que peu de vacance disponible (18 648 logements en vacance de longue durée à Paris, soit 1,3% du parc selon les fichiers LOVAC), et il s’agit surtout d’une attente de rénovation, en lien avec la contrainte énergétique.

Quant aux résidences secondaires et occasionnelles, elles regroupent à la fois de l’offre touristique (le meublé de tourisme saisonnier, de type AirBnB) et des logements professionnels (pied à terre, logement de fonction) pour un certain nombre d’emplois-cadres concentrés dans les coeurs d’agglomération. Le cas de Paris illustre particulièrement bien ce phénomène, puisqu’il s’agit à la fois de la première ville touristique au monde, avec près de 47 millions de nuitées par an, et de la ville qui concentre le plus d’emplois de “cadres des fonctions métropolitainesen France (emplois stratégiques de secteurs d’activité à fort rayonnement économique international), tant en nombre qu’en part relative de l’emploi (38%, contre 27% au national).

La ville voit donc se superposer deux réalités paradoxales et concurrentes : l’échelle locale d’un habitat urbain du quotidien, et l’échelle nationale voire internationale pour sa fonction touristique et économique. L’aire de recrutement des emplois de cadres CFM des métropoles est nationale et impose des besoins en logements temporaires mal identifiés dans la statistique. C’est ce que la géographie a nommé le “spatial mismatch“, une inadéquation spatiale présente dans toutes les métropoles mondiales, et qui explique par ailleurs l’essor des prix par la concurrence des usages, tout comme le rejet de ménages modestes hors des centres.

En somme, bien peu de ces logements ne sont réellement “inoccupés”, au sens d’un logement qui serait inutilisé et donc récupérable. La question du logement est ici étroitement corrélée à la structure même de l’emploi et de l’activité économique des métropoles. La concentration des CFM ne cesse de progresser en France (+2 points en 10 ans), tout comme l’attractivité parisienne : la source du problème reste donc toujours vive.