Il s’agit cette semaine de la proportion de copropriétés en « seuil de vigilance », en France. Cela signifie, selon l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH), que les impayés de charges dépassent 11% du budget annuel de l’immeuble.
Au sein de cet ensemble d’environ 148 000 immeubles, 54 653 sont même placés en état « d’alerte grave », avec plus de 30% d’impayés. Et encore cette estimation n’est-elle faite que sur les copropriétés dûment immatriculées – une obligation légale depuis 2018 – alors que seules 599 769 le sont effectivement, soit 75% environ des immeubles concernés, si bien que l’on ne sait pas exactement ce qu’il en est du reste (voir le rapport annuel 2024 du Registre national des copropriétés, sur le site de l’ANAH). Cette imprécision s’explique notamment par le fait qu’environ 30% des copropriétés en France – essentiellement petites – sont gérées sans syndic, voire 50% en Seine Saint-Denis (Le Monde, 2025).
L’ANAH définit également d’autres critères de risque, comme des problèmes de structure, d’isolation nécessitant rapidement des travaux (les immeubles construits entre 1961 et 1974 étant actuellement les plus concernés par des besoins de rénovation), ou de fragilité des structures juridiques de l’immeuble. Dans cette lecture, seules 35% des copropriétés sont « sans risques » ou « à risques faibles ».
Les facteurs explicatifs à cet état de fait sont nombreux: difficulté de financement de la part de copropriétaires occupants dont les revenus ont baissé (ex: petites retraites), ou de primo-accédants en limite de budget, augmentation récente des charges, notamment de l’énergie depuis 2022, mais aussi un déficit de culture de l’anticipation et du provisionnement en France, malgré les efforts de conseil des syndics.
L’instauration du fonds travaux pourrait y aider, mais à 5% du budget il ne permet pas de couvrir les gros investissements. La mise en place d’un diagnostic technique global et d’un plan pluriannuel de travaux (PPT) vont également dans le sens d’une meilleure anticipation, si ce n’est que ces documents sont longtemps restés optionnels. Signe des temps, le PPT est désormais obligatoire pour toutes les copropriétés depuis le 1er janvier dernier. Enfin, la loi Habitat dégradé d’avril 2024 doit permettre d’agir plus efficacement en cas de grande difficulté, avec des régimes d’aides, d’accélération de la décision et de prêts collectifs. On y trouve aussi la possibilité pour les syndics d’être investis d’un statut de « syndic d’intérêt collectif » mais ce statut, encore bien mal défini, n’a pas encore de visibilité. Les professionnels, depuis 2015, ont plutôt développé leur propre label (QualiSR) pour certifier la compétence de certains syndics dans le redressement d’immeubles en difficulté, preuve que le vieillissement du parc d’immeubles et les difficultés économiques du logement sont devenus maintenant une préoccupation générale.